"Le motif de base de la résistance était l'indignation. Nous vétérans des mouvements de résistance et des forces combattantes de la France libre, nous appelons les jeunes générations à faire vivre, transmettre, l'héritage de la résistance et ses idéaux. Nous leur disons : prenez le relais, indignez-vous ! Les responsables politiques, économiques, intellectuels et l'ensemble de la société ne doivent pas démissionner, ni se laisser impressionner par l'actuelle dictature des marchés financiers qui menacent la paix et la démocratie.

Je vous souhaite à tous, à chacun d'entre vous d'avoir votre motif d'indignation. C'est précieux."

Stéphane Hessel

jeudi 2 novembre 2017

Climat, lettre à mes lecteurs

A l’issu de la COP21 je fus l’un des rare à ne pas me réjouir dans l’euphorie générale. En 2015 j’écrivais sur ce blog le texte « COP21 : Sauver la planète sans contrarier le système qui la détruit. » qui montrait combien cet événement de com internationale était une grande farce. Je disais que définitivement, la communication aura été bien faite alors que nous étions toujours sur la trajectoire des +3 degrés et, après ma démonstration, je concluais que le temps n’était vraiment pas aux réjouissances !!!! Combien de fois me suis-je fait traiter de pisse froid ? Et pourtant, encore une fois, j’avais raison sur ce sujet et aujourd’hui, l'ONU alerte les pays signataires de la COP 21 que l’on est plutôt sur une trajectoire à +3°C d'ici 2100. C'est catastrophique selon l'organisation internationale.

Depuis des années, moi et beaucoup d’autres, nous alertons. Depuis des années j’explique que nous ne sommes pas que les victimes des méchantes entreprises qui pourrissent le climat et la planète mais qu’à ne pas vouloir renoncer, à ne pas vouloir utiliser notre pouvoir de non-achat, à ne pas voter pour la transition écologique nous sommes tous, à différents niveaux, responsables et coupables de cette situation. Il est des vérités qui ne sont pas toujours agréables à entendre - je vous l’accorde - mais oui, toi, cher lecteur de ce billet, tu es aussi responsable de cette situation. A continuer à prendre l’avion, car il t’est « impossible d’imaginer de ne pas voir le soleil en hivers ! ». A continuer à acheter des fruits exotiques car tu as « absolument besoin de ces vitamines ! ». A continuer à acheter des produits manufacturés plein d’huile de palme, car tu « n'y peux rien s'il y'en a partout ! ». A continuer à prendre ta voiture seul, pour faire tes 120 km A/R, pour aller au boulot car tu voulais « absolument avoir ta maison avec ton jardin pour respirer le week-end, pas question d'habiter en immeuble ! ». A continuer à t’acheter moult saloperies électroniques car « c'est trop bien la dernière version de ce téléphone » et que « t'en as totalement besoin car ça va tellement te simplifier la vie ! ». A continuer à ne pas faire réparer ton électroménager, car c'est pas de ta faute si « ça coûte moins cher d'acheter du neuf ! ». A continuer à ne pas trier, recycler, composter, tendre vers moins de déchets, car tu n'as « pas la place et pas le temps, pi toute façon les autres le font pas ! ». A continuer à te railler des écologistes et soutenir tacitement, silencieusement et par ton inaction le bétonnage des terres agricoles et forestières. En cédant, sans résistance, aux sirènes de la consommation et en croyant au dogme de la croissance et à ses grands prêtres, tu fais, cher lecteur, parti de ces gens responsables de la dégradation de notre environnement.

Pourtant, cher lecteur, tu ne peux pas invoquer l’ignorance des problèmes. Partout et par tous les moyens untel aura tenté de t’interpeller qui avec un documentaire, qui par une bande-dessinée, qui par une fiction, qui par un roman, qui par le théâtre, qui par l'humour, qui par une thèse, qui par une interview, qui par un reportage, qui par un court texte, qui par une chronique télé ou radio, qui par une poésie, qui par une conférence, ... il y en aura eu pour tous les goûts, pour tous les niveaux. Il y aura bien eu un média qui t’aura touché, cher lecteur. Non pas un seul ?

Depuis des années j’écris et souvent j’ai de bons retours mais rien n’y fait, la bataille des deux degrés est perdue selon l’ONU. « Qu’importe ! », dira notre humanité demain, 2100 c’est loin, « moi je veux vivre, je veux profiter ». « Profiter » … c’est bien ce mot que chacun souhaite au copain qui part à l’autre bout du monde pour passer quinze jours de vacances. Nous nous souhaitons de « profiter » sans nous soucier des conséquences de cette « profitation » comme on dit aux Antilles. Nous jouissons, sans conscience, de nos richesses, de notre puissance et de notre pouvoir, mais aujourd’hui l’ultime alerte nous parvient. Quelles seront les autres avant l’effondrement ? Nous avons déjà nié, parce que cela nous arrangait, cela nous rassurait, le pic pétrolier qui a eu lieu en 2006. Nous refusons de croire, car nous nous pensons immortel et notre monde permanent et stable, que nous entrons dans l’ère de la pénurie. Finalement nous n’avons pas vraiment beaucoup évolué depuis l’époque où les hommes croyaient que la Terre était plate, aujourd’hui nous ne croyons toujours pas que la Terre est finie et les ressources non-renouvelables. Nous continuons la fête.

On est donc sur la trajectoire à +3°C d'ici 2100 et c'est catastrophique. Si l'on prend 2016 comme exemple, c'est une année de records. De records de températures, mais aussi de concentration de carbone dans l'atmosphère. Principalement à cause des énergies fossiles, pétrole, charbon, gaz... mais aussi du méthane, de la déforestation, qui nous prive des arbres qui captent le carbone, de toute notre folie collective que nous, individuellement, nous réclamons en vivant comme nous le faisons, en refusant de vivre simplement mais en consommant toujours plus, en voyageant toujours plus car le billet d’avion « c’est pas cher, alors je serais con de ne pas en profiter et de toute façon, que j'y aille ou pas, l'avion décollera quand même ! ». Mon père me donnait, comme image, que notre humanité est comme ces rats abandonnés, au milieu de l’océan, sur un bateau en bois et qui grignotent, pour se nourrir, la coque. Moi je lui disais que nous étions comme ces moisissures qui ne se développent qu’en détruisant leur support. Quoi qu’il en soit l’image est la même, nous sommes une espèce absurde car savante mais est incapable de se sauver elle-même.

Aujourd’hui donc « les engagements actuels des Etats couvrent à peine un tiers des réductions d'émissions nécessaires, creusant un écart dangereux » annonciateur de grands dérèglements (canicules, inondations, super-ouragans...), souligne Erik Solheim, directeur du Programme des Nations unies pour l'Environnement (PNUE), « Gouvernements, secteur privé, société civile doivent combler cet écart catastrophique ». Selon le rapport du PNUE, synthèse des dernières études scientifiques, il faut à la fois « urgemment accélérer les actions à court terme et renforcer l'ambition à long terme ». Tous les pays sont concernés, notamment ceux du G20 qui représentent 3/4 des émissions.

Et vous, maintenant, qu’allez-vous faire pour, comme le dit Érik Solheim, « éviter un avenir misérable à des centaines de millions de personnes » ? Qu’allez-vous faire pour respecter la promesse que nous avons faite à nos enfants de protéger leur avenir ?

Avec toute mes amitiés, votre dévoué.

Bruno BOMBLED

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