"Le motif de base de la résistance était l'indignation. Nous vétérans des mouvements de résistance et des forces combattantes de la France libre, nous appelons les jeunes générations à faire vivre, transmettre, l'héritage de la résistance et ses idéaux. Nous leur disons : prenez le relais, indignez-vous ! Les responsables politiques, économiques, intellectuels et l'ensemble de la société ne doivent pas démissionner, ni se laisser impressionner par l'actuelle dictature des marchés financiers qui menacent la paix et la démocratie.

Je vous souhaite à tous, à chacun d'entre vous d'avoir votre motif d'indignation. C'est précieux."

Stéphane Hessel

dimanche 24 juin 2012

Rio : le sommet enterre l’intérêt général

Comme un préambule à un échec annoncé par l'aveuglement des Nations devant les défis environnementaux, climatiques et énergétiques qui se profilent devant l'humanité, les autorités brésiliennes avaient résolument choisi d’éloigner à 50 km du lieu de la Conférence officielle le sommet alternatif des peuples, où les ONG ont réuni quelque 20 000 personnes durant dix jours.


Ainsi comme le craignaient l'ONU et les ONG, vingt ans après le Sommet de la Terre de 1992, qui a donné naissance aux conventions sur le climat, la biodiversité ou la désertification, l’édition 2012 a cruellement déçu souffrant d’une cruelle absence d’ambition. «Ce futur n’est pas dans ce texte», ont rétorqué - pour contredire la déclaration finale officielle intitulée pompeusement «Le futur que nous voulons» - les leaders de la société civile, parties prenantes de la préparation de la conférence, mais qui ont adressé jeudi une lettre aux Nations Unies pour se désolidariser d’un texte dénué «d’engagements concrets». Parmi les signataires : Marina Silva (ancienne ministre brésilienne de l’Environnement), Kumi Naidoo (patron de Greenpeace), Ignacy Sachs (l’économiste à l’origine de l’éco-développement) ou la philosophe et militante indienne Vandana Shiva.

Les principales ONG ont exprimé leur colère face à ce qu’elles qualifient d’échec. Au final, la déclaration de Rio frappe par la place mineure qu’y tient l’environnement. L’économie verte, qui avait été présentée comme le fer de lance de Rio + 20, a, elle, fait un bide. Appuyée par le Pnue, vantée par les pays industrialisés et les multinationales, elle a été balayée par les pays émergents qui la considèrent comme un greenwashing du capitalisme, masquant des freins à leur développement et des entraves au commerce international. Le thème de la protection des océans, porté par une coalition d’ONG, soutenu par la France et le Brésil notamment, a réussi à émerger. Mais le lancement du processus de négociation sur la protection de la haute mer a finalement été torpillé par les Etats-Unis, qui ont notamment réussi à repousser toute décision à 2015.

La déclaration de Rio + 20 semble donc déconnectée de l’état de la planète, ignorant l’épuisement des ressources naturelles, les défis démographiques ou de sécurité alimentaire. On peut aussi s’interroger sur l’état de la gouvernance mondiale et de l’adaptation du processus onusien aux bouleversements géopolitiques : une Europe affaiblie, un Brésil émergent, mais qui ne veut pas quitter son statut de pays en voie de développement, une Chine très discrète qui s’est abritée derrière les pays du Sud à la manœuvre, un Canada en pleine régression environnementale à la remorque des Etats-Unis. A Rio, on a assisté à l’émergence d’«un monde de nations plutôt que d’institutions internationales», conclut Laurence Tubiana, fondatrice de l’Iddri.

D'après ÉLIANE PATRIARCA
liberation.fr

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